Réconstitution d'une cornemuse médiévale du XIVème siècle
Modèle «Guillaume de Machaut »
L'iconographie médiévale du XIII au XV siècle, offre un grand nombre de représentations de cornemuses. L'étude minutieuse de ces documents atteste l'existence de plusieurs modèles différents : perces coniques, avec ou sans pavillon, perce cylindrique avec bourdon parallèle, bourdon constitué de deux ou trois parties. L'organologie de ces cornemuses ne semble pas liée à un pays, une région, à un milieu social ou culturel. Les proportions de ces cornemuses nous indiquent, certes de manière imprécise, que ces instruments devaient être fabriqués dans plusieurs tonalités.
Aucun original n'a été conservé et aucun document ou texte ancien, précisant les proportions, n'existent sur la facture et la conception des cornemuses de l'époque médiévale. Les premiers témoignages précis n'apparaissent qu'au XVII siècle. Reconstituer un des types de ces instruments est donc un projet très périlleux, pouvant être mis en cause à tout moment.
Pour cette reconstitution, je me suis appuyé sur plusieurs paramètres historiques : la perce conique du hautbois est une transposition de celles que j'ai relevés sur plusieurs chalémies originales conservées dans différents musées. Plusieurs textes du XVII siècle sont très explicites sur la parenté du « dessus » de hautbois et le chalumeau de la cornemuse. La similitude entre la « Kleim. chalmey » décrite par Préotorius, et les nombreux chalumeaux représentés dans l'iconographie, est frappante. De plus, le couple cornemuse / chalémie est une alliance très fréquente, il est tentant d'en déduire que les facteurs de l'époque concevaient ces instruments dans une même direction acoustique. La conception du bourdon pose moins de problèmes, les perces cylindriques relevées sur des cornemuses anciennes, nous fournissent des indications sur celles que l'on pouvait trouver à l'époque médiévale. Néanmoins un détail d'importance doit être pris en compte. De nombreux documents montrent de façon très claire que le pavillon ou résonateur du bourdon était ouvert, à la manière des pavillons de chalémies. Ce détail se retrouve sur un grand nombre de représentations et d'auteurs de différentes époques. Des essais sur des prototypes m'ont permis d'élaborer ce pavillon. La sonorité obtenue est puissante, renforçant les harmoniques. Les essences de bois que j'ai sélectionné, sont essentiellement les fruitiers : cormier, alisier, poirier. Ces bois donnent un timbre chaleureux, atténuant les harmoniques aiguës, ce qui facilite le jeu avec d'autres instruments moins puissants.
Il m'a paru important de respecter l'esthétique du tournage historique que j'ai observé sur de nombreux documents, des moulurages sobres laissant apparaître des courbes épurées, caractéristiques de l’époque concernée.
Thierry Bertrand
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